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Le bonheur selon Épicure et Aristote : divergences et convergences

Explorez les conceptions du bonheur développées par Épicure et Aristote, deux figures majeures de la philosophie antique. Cet article compare leurs approches et met en lumière les principaux éléments de leurs philosophies morales.

Introduction au bonheur philosophique

Le bonheur, une quête universelle, a été au cœur des réflexions philosophiques depuis l'Antiquité. Deux figures marquantes, Épicure et Aristote, ont développé des théories distinctes sur la nature du bonheur et les moyens d'y parvenir. Bien que leurs approches diffèrent considérablement, elles offrent des perspectives précieuses sur ce qui constitue une vie épanouissante.

Épicure et le plaisir : l'ataraxie et l'aponie

Pour Épicure, le bonheur (eudaimonia) se trouve dans le plaisir, mais pas n'importe quel plaisir. Il distingue :

  • Les plaisirs naturels et nécessaires : comme manger quand on a faim, boire quand on a soif, se vêtir pour se protéger du froid. Il faut satisfaire ces besoins avec modération.
  • Les plaisirs naturels et non nécessaires : comme manger des mets raffinés, boire des vins coûteux. Épicure considère qu'il faut les éviter, car ils entraînent des désirs insatiables.
  • Les plaisirs non naturels et non nécessaires : comme la recherche de la gloire, du pouvoir, de la richesse. Ils sont sources de troubles et d'insatisfaction.

Le véritable bonheur, selon Épicure, réside dans l'absence de douleur physique (aponie) et l'absence de trouble de l'âme (ataraxie). Il s'agit d'un état de sérénité et de tranquillité intérieure, atteint par la satisfaction des besoins naturels et nécessaires, ainsi que par la modération et la prudence.

Exemple concret : Imaginez une personne stressée par son travail et angoissée par l'avenir. Pour Épicure, elle devrait chercher à simplifier sa vie, à se concentrer sur les plaisirs simples comme passer du temps avec des amis, lire un livre, ou se promener dans la nature, afin d'atteindre l'ataraxie.

Aristote et la vertu : la voie de l'excellence

Aristote, quant à lui, conçoit le bonheur comme l'activité de l'âme conforme à la vertu (aretê). Le bonheur n'est pas un état passif, mais une activité qui se déploie tout au long de la vie.

  • La vertu est un juste milieu : entre deux extrêmes, un excès et un défaut. Par exemple, le courage est le juste milieu entre la témérité (excès) et la lâcheté (défaut).
  • Les vertus morales : concernent la maîtrise des passions et des désirs (courage, tempérance, générosité...).
  • Les vertus intellectuelles : concernent l'exercice de la raison (sagesse, prudence, intelligence...). La plus haute vertu est la sophia, la sagesse théorique, qui permet de contempler la vérité.

Pour Aristote, le bonheur véritable est inséparable de la moralité. Il s'agit de développer ses potentialités et d'agir conformément à la raison et à la vertu. Une vie heureuse est donc une vie vertueuse, une vie consacrée à la recherche de l'excellence dans tous les domaines.

Exemple concret : Un étudiant qui travaille dur pour réussir ses études, qui aide ses camarades, et qui se soucie de l'intérêt général, est, selon Aristote, sur la voie du bonheur. Il développe ses vertus intellectuelles et morales, et contribue ainsi à son propre épanouissement et à celui de la société.

Comparaison des deux conceptions

Voici un tableau comparatif pour résumer les différences et les points communs entre les deux philosophies:

Caractéristique Épicure Aristote
Nature du bonheur Absence de douleur et de trouble (ataraxie, aponie) Activité de l'âme conforme à la vertu
Source du bonheur Plaisirs simples et naturels Exercice de la raison et développement des vertus
Rôle de la modération Essentiel pour éviter les désirs insatiables Important pour atteindre le juste milieu
Importance de la moralité Moyennement importante (recherche du plaisir individuel) Essentielle (bonheur indissociable de la vertu)
Caractère passif/actif du bonheur Plutôt passif (état de sérénité) Actif (développement des potentialités)

Malgré leurs différences, Épicure et Aristote s'accordent sur l'importance de la modération et de la prudence pour atteindre le bonheur. Ils reconnaissent également que le bonheur est un objectif à long terme, qui exige des efforts et de la discipline.

Conclusion : Quel bonheur choisir ?

Les conceptions du bonheur d'Épicure et d'Aristote offrent des perspectives complémentaires sur cette quête fondamentale de l'existence humaine. Épicure nous invite à simplifier notre vie et à apprécier les plaisirs simples, tandis qu'Aristote nous encourage à développer nos vertus et à rechercher l'excellence. Le choix entre ces deux philosophies dépend de nos propres valeurs et de notre conception de la vie.

Ce qu'il faut retenir

  • Épicure : Le bonheur est l'ataraxie (absence de trouble de l'âme) et l'aponie (absence de douleur physique). Il faut rechercher les plaisirs naturels et nécessaires avec modération.
  • Aristote : Le bonheur est l'activité de l'âme conforme à la vertu. Il faut développer ses vertus morales et intellectuelles et rechercher l'excellence.
  • Points communs : La modération et la prudence sont importantes pour les deux philosophes. Le bonheur est un objectif à long terme qui demande des efforts.
  • Différences : Épicure privilégie le plaisir individuel et la simplicité, tandis qu'Aristote met l'accent sur la moralité et le développement personnel.

FAQ

  • Quelle est la différence entre l'ataraxie et l'aponie ?

    L'ataraxie est l'absence de trouble de l'âme, un état de sérénité et de tranquillité intérieure. L'aponie est l'absence de douleur physique.
  • Selon Aristote, le bonheur est-il accessible à tous ?

    Aristote considère que le bonheur est accessible à ceux qui cultivent la vertu et qui agissent conformément à la raison. Il faut également avoir des circonstances de vie favorables (santé, richesse modérée, etc.).
  • Épicure prône-t-il une vie d'hédonisme débridé ?

    Non, Épicure ne prône pas l'hédonisme débridé. Il insiste sur l'importance de la modération et de la prudence dans la recherche du plaisir. Il considère que les plaisirs excessifs sont sources de troubles et d'insatisfaction.